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Mémoires d'une petite culotte de soie

Nouvelle écrite en 2024

Inédite

Une petite culotte de soie et son frère le soutien-gorge ont été offerts à Ludmila en cadeau de Saint-Valentin. Moins visible que ce fanfaron de soutien, « toujours planquée sous jupe ou pantalon », elle a cependant conscience de sa position privilégiée.

Une relation fusionnelle l’amène à partager le ressenti de celle qui est à la fois son lieu de vie et sa déesse adorée. Tout irait pour le mieux si Luiz, l’ami attitré de Ludmila, n’avait pas eu l’idée saugrenue de lui présenter un jour l’excentrique et piquante Murielle, qui va jeter le trouble dans le couple.

Présentation

Il a eu bien du mal, Luiz, à choisir ce qu’il voulait offrir à Ludmila pour la Saint-Valentin ! Il a eu la main heureuse, ça lui plaît, cette petite culotte de soie et son frère assorti.

Mieux, ça plaît à la petite culotte, qui se sent immédiatement en phase avec la femme qui partagera sa vie au jour le jour, et dont elle connaîtra et ressentira toutes les émotions. Elle-même en connaîtra, des émotions, qui s’apparenteront parfois à des mésaventures. Tout a commencé à tourner mal quand Luiz a eu la malencontreuse idée d’introduire innocemment la dénommée Murielle, avec deux LL, dans leur petit cercle si harmonieux.

Extrait

Je m’entends bien avec mon frère, mais il m’énerve. Il fait le fier, il se pavane à longueur de journée, toujours en façade. On ne voit que lui ! Une bretelle qui glisse, une transparence de bon aloi d’un chemisier qui laisse tout deviner. Posé sur ces avant-postes arrogants, impossible de le louper. Son but est moins de cacher que de mettre en valeur. Et de SE mettre en valeur par la même occasion. Monsieur le soutien-gorge, c’est Monsieur le soutien-gorge ! En vitrine ! Sous le pull, il est là, ça se voit, sans aucun doute possible. Le conteneur primant sur le contenu, comme dans une bonne publicité.

Moi ? Toujours planquée, sous jupe ou pantalon. Enfermée, invisible. Un coup de vent parfois… mais il faut que le vent soit fort et la jupe souple et pas trop longue. Tout le monde n’a pas le toupet de Marilyn ! La mini-jupe m’a donné quelque chance. Mais c’est un leurre. On n’entrevoit que le bas et encore, à condition d’être plus bas. Les enfants peut-être ? Ou alors dans l’escalier ? Ou à la faveur d’un mouvement distrait… on peut espérer. Mais ça ne vaut pas le coup. On voit ta culotte ! Voire ! Qu’est-ce qu’on voit ? Une esquive de couleur, un mini carré blanc – censure !– au bout d’un tunnel de jambes, qui n’est jamais éclairé !

On ne me voit pas. Je cache et suis cachée. C’est ma fonction, c’est mon rôle. C’est ma place. Et j’y tiens. Au plus chaud, au plus intime, au plus secret. Je suis la favorite de ma maîtresse. La dernière dont elle se sépare. Si vous ne gardez qu’un vêtement, c’est celui-là… Le préféré. Je fais un peu partie de Ludmila. Même si elle ne le sait pas. Moi, je le sais.

Mon frère a un nom, elle l’appelle Soutif… Je n’aime pas. On dirait le nom d’un chien. Soutif, viens ici, mon garçon ! Au pied !

Faut dire qu’elle le perd souvent, Soutif. Elle l’enlève régulièrement. Car il la gêne. Il la comprime. C’est qu’il n’est pas souple, lui. Il a des principes. Et des baleines. Dont il ne se sépare jamais, qui sont la base de sa performance. Deux courbes métalliques prises dans le tissu, pour assurer son rôle de soutien de famille. Responsabilité que je n’ai pas. Moi, je fais dans la tendresse. Chacun ses contraintes et ses avantages !

Il ne peut pas les enlever, ses baleines, mais elle, peut l’enlever, lui, et elle ne s’en prive pas. Elle rentre de sa journée de boulot, elle rentre d’une soirée arrosée… Hop, les chaussures, hop, le soutien… Au diable, les tortionnaires ! Moi, elle me garde. Nous sommes bien ensemble.