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L’avis du chat

Écrit en 1993

  • Publié dans le recueil Clair d’étoiles (mini-édition personnelle, épuisée) en 2011
  • Publié dans Reflets de chez nous (revue de l’AREW)

Conte pour rire… et réfléchir

Ça pense, un chat ? Et ça pense quoi ?

La vie vue par le chat de la maison. Un tout autre point de vue… qui donne à réfléchir. Mettez-vous dans la peau d’un chat. Recette : insolence et charme, avec une pincée d’humour pour faire passer le tout. Philosophie féline !

Conte plusieurs fois primé

Présentation

Un petit chat qui, l’air de rien, est le maître de la maison. Du moins le sent-il ainsi. Il juge avec une tendre indulgence, peut-être un rien de condescendance, les humains qu’il héberge sous son toit – et dont il ne comprend pas l’activité débordante – et inutile à ses yeux.

Entre humour et philosophie, un clin d’œil à tous ceux qui aiment les chats.

Et une main tendue à ceux qui ne les aiment pas.

Extrait

Ils ôtent toutes leurs peaux sauf la dernière, lamentable pellicule nue comme une peau de grenouille avec quelques poils misérables fort mal répartis. Et, par dépit sans doute, ils s’attaquent à ces malheureux poils et les éliminent, ne gardant sur le crâne qu’un fragment de fourrure, qui fait toute leur fierté.

Même comportement de soumission en ce qui concerne leurs griffes. Ils se les coupent, les liment, les rongent. Les masquent sous une couche de couleur. Rouge ! Bonjour le camouflage !Ils se mutilent, allant même quelquefois jusqu’à ôter leurs dents ! Ils les offrent alors dans un bol à un dieu, qui chaque jour dédaigne l’offrande. Qui voudrait d’un tel cadeau ? Ensuite, quelle horreur, ils se mouillent ! Ils se plongent entièrement dans l'eau pour supprimer toutes leurs odeurs avec une brique odorante. En dominés qui s’effacent. Ils ne se lèchent jamais, je vous demande un peu si c'est propre !

Les peaux qu'ils enlèvent, ils les torturent dans une cuve bruyante qui les brasse et les tourne en bourrique. Puis ils les laissent pendre comme des trophées, eux qui sont incapables d'attraper la moindre souris. Leur propre peau, imaginez-vous ! Puis la grande femelle recueille les dépouilles et les brûle longuement avec l'objet pointu dont j’ai parlé tout à l’heure. Quel rituel, mes frères !

Dernièrement, il leur est arrivé un nouveau petit diable. De taille normale, celui-là. À peu près grand comme moi. Mais la comparaison s'arrête là. Pauvre diable. Pas un poil sur la tête. Pas un. Tout nu, tout rose. Complètement recroquevillé, les membres atrophiés repliés sur le ventre, comme une mouche morte, incapable de se déplacer. Une misère. Et des cris à vous percer les tympans. J'ai beau être habitué à leur boucan, quand celui-là s'y met, je me sauve. La grande femelle se penche alors sur lui. Et je ne sais pourquoi, cela provoque en moi comme une nostalgie.

Ce qui me met en rogne par contre, c'est qu'elle appelle cette chose "mon chat, mon petit chat". Il faut vous dire que cha est le son par lequel ils me désignent, dans leur charabia compliqué. Me comparer à cet avorton ! Moi, si beau, si souple, si élancé !